1. Insuffisance des données toxicologiques sur les métabolites
Lors de l’évaluation des pesticides pour leur mise sur le marché, les études de toxicité des métabolites sont souvent limitées. Seules des analyses de génotoxicité in vitro sont systématiquement requises pour les métabolites prévus à des concentrations supérieures à 0,1 µg/L dans les eaux souterraines. D’autres études, notamment sur la toxicité à long terme, la cancérogénicité ou la reprotoxicité, ne sont pas obligatoires et rarement demandées. Cette lacune signifie que de nombreux pesticides sont autorisés sans une évaluation complète de la toxicité de leurs métabolites.
2. Surveillance inadéquate des métabolites dans les eaux
La surveillance des métabolites dans les eaux brutes et potables est insuffisante. En 2022, 71% des métabolites à risque pour l’eau potable n’ont fait l’objet d’aucun suivi dans les eaux souterraines ou l’eau potable. Cette absence de surveillance empêche une évaluation précise de l’exposition des populations à ces composés potentiellement nocifs.
3. Méthodologies d’évaluation incohérentes
Les méthodologies d’évaluation de la pertinence des métabolites varient entre les États membres et les agences, entraînant des incohérences dans les conclusions. Par exemple, un métabolite peut être jugé pertinent par l’EFSA mais non pertinent par l’Anses, ce qui complique la gestion des risques et la communication auprès du public.
4. Autorisations malgré des risques connus
Certaines substances actives sont autorisées malgré la connaissance de risques de dépassements des normes de qualité de l’eau par leurs métabolites. Les autorités sont conscientes de ces risques, mais les autorisations persistent, entraînant des pollutions prévisibles des ressources en eau.
En conclusion il y a urgence d’engager une réforme pour une évaluation et une surveillance vraiment efficace des métabolites
Les métabolites de pesticides représentent une menace sous-estimée pour la santé publique et l’environnement. Les lacunes dans l’évaluation toxicologique, la surveillance insuffisante dans les eaux, les méthodologies incohérentes et les autorisations malgré des risques avérés illustrent les faiblesses systémiques de la réglementation actuelle. Cette situation met en lumière la nécessité de réformer en profondeur les processus d’évaluation et de gestion des pesticides.
Pour protéger durablement les populations et préserver nos ressources en eau, il est impératif de :
- Renforcer les exigences réglementaires concernant les études toxicologiques sur les métabolites, en intégrant des tests à long terme sur leurs impacts sanitaires.
- Harmoniser les méthodologies d’évaluation entre les États membres et les agences européennes pour garantir des décisions cohérentes et scientifiquement fondées.
- Améliorer la surveillance des eaux afin de détecter et gérer rapidement la contamination par les métabolites.
- Favoriser une prévention ambitieuse, en privilégiant une reconception des systèmes agricoles non dépendants aux pesticides de synthèse.
Face aux défis croissants liés à l’usage des pesticides, ne rien changer reviendrait à accepter une dégradation continue de la qualité de l’eau et in fine de notre santé ainsi que des coûts exorbitants pour la collectivité (cf. le rapport des inspections générales sur le sujet qui démontre que les mesures curatives pour traiter les eaux contaminées par des métabolites sont coûteuses et répercutées sur les consommateurs. Les inspections générales recommandent des actions préventives urgentes car sans mesures préventives ambitieuses, la reconquête de la qualité des eaux est illusoire.)